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Recherche Sous les tropiques, le réchauffement climatique favorise les arbres à croissance lente, plus petits et plus denses

Forêt du mont Panié, en Nouvelle-Calédonie. © M. Tassin/Cirad

Une étude publiée dans Global Change Biology vient d’établir que les espèces tropicales les plus petites et dotées d’une croissance plus lente avaient tendance à mieux tolérer la sécheresse. Ces résultats permettront de mieux anticiper les effets du changement climatique sur la démographie et le futur paysage des forêts tropicales, affirme le Cirad, qui a participé à ce travail.

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En 2020, une étude parue dans «Science» a montré que la dynamique d’une forêt tropicale peut être prédite en positionnant les nombreuses espèces d’arbres qui la composent le long de deux axes. Le premier, construit sur des traits de vie liés à la vitesse de leur développement, différencie les espèces qui poussent vite, à durée de vie courte, des espèces à croissance lente qui ont une longue durée de vie. Le second axe sépare les espèces à grande taille se reproduisant peu de celles de petite dimension mais à fort potentiel reproductif.

Selon cette étude, la vitesse de croissance et la durée de vie de l’immense diversité des arbres tropicaux pourraient être prédites à l’aide de quelques caractéristiques simples à mesurer. Mais qu’en est-t-il du comportement de ces espèces en contexte changeant, en particulier face au dérèglement climatique ? C’est ce qu’une autre équipe de scientifiques a étudié, en explorant comment la tolérance à la sécheresse des espèces pouvait être associée aux deux axes décrits ci-dessus.

« Nous avons passé en revue la littérature scientifique pour extraire des caractéristiques de 601 espèces d’arbres tropicaux, précise Joannès Guillemot, chercheur en écophysiologie forestière au Cirad et premier auteur de la nouvelle étude. L’objectif était de les ranger selon les axes définis par l’étude du magazine Science et de voir si on observait une corrélation avec des traits de tolérance à la sécheresse. Nous avons donc cherché à savoir si celle-ci est une dimension indépendante de la démographie des forêts tropicales ou si elle est associée aux autres déterminants déjà mis en évidence. »

Les scientifiques ont également exploré la proximité génétique des espèces : les plantes à fort lien de parenté partagent-elles un niveau similaire de tolérance à la sécheresse ?

Une tendance générale qui favorise les espèces de petite taille et à croissance lente

La tolérance à la sécheresse s’est révélée corrélée à la taille et à la vitesse de croissance des espèces, celles de petite taille et à vitesse de croissance lente présentant une tolérance plus forte.

Pour Nicolas K. Martin-StPaul, chercheur à l’Inrae et second auteur de l’étude, « nos résultats fournissent un cadre conceptuel pour interpréter la saturation de la productivité des forêts tropicales sous la pression du changement climatique. Ils permettent d’imaginer la composition et les formes des forêts tropicales de demain ».

Le deuxième résultat majeur indique que des espèces pourtant très proches génétiquement peuvent avoir des tolérances à la sécheresse très différentes. « C’est une mauvaise nouvelle pour les praticiens de la restauration ou de la conservation forestière, puisqu’on ne peut pas utiliser nos connaissances actuelles pour prédire le comportement des plantes que l’on ne connaît pas, même entre espèces apparentées », note Joannès Guillemot.

Des conséquences locales encore limitées

Les scientifiques alertent cependant sur les conclusions à tirer de cette étude : si le travail de recherche permet d’établir une tendance générale, les applications locales restent très limitées. Comme le souligne Joannès Guillemot : « Bien que nous ayons montré que la tolérance à la sécheresse n’est pas une dimension indépendante des autres axes démographiques, la corrélation entre cette tolérance et d’autres attributs couramment mesurés, comme la densité du bois ou l’épaisseur des feuilles, est trop faible pour permettre des prescriptions au niveau local. La mesure de la tolérance à la sécheresse reste donc indispensable, en particulier pour assurer le succès des actions de restauration forestière sous changement climatique. »

Cirad, le 19/01/2022

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